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Vigneron

Vin désalcoolisé : mieux comprendre la nouvelle tendance

Écrit par  Esther HAFENSCHER
Publié le 22 mai 2025
6 min. de lecture

Le vin désalcoolisé s'affirme comme une tendance prometteuse, reflet d'une évolution des préférences des consommateurs. Moins d’attrait pour l’alcool, quête de produits sains ou de nouvelles expériences gustatives, le vin désalcoolisé coche toutes ces cases. Ce qui était perçu comme une niche, un objet de curiosité, devient un segment de marché structuré, ouvert aux vignerons souhaitant se diversifier et conquérir une nouvelle clientèle.

Le vin désalcoolisé, ou boisson désalcoolisée, se révèle aujourd’hui comme un segment de marché en pleine expansion. Il offre aux viticulteurs une opportunité unique de diversifier leur gamme. Découvrez dans cet article :

  • Qu’est-ce qu’un vin désalcoolisé ? Définition et profils organoleptiques.
  • Techniques de désalcoolisation : osmose inverse, distillation sous vide…
  • Tendances du marché et avantages réglementaires.


Qu'est-ce qu'un vin désalcoolisé ?

Définition et degrés d’alcool résiduel

Un vin désalcoolisé est un vin dont l'alcool a été partiellement ou totalement retiré après la fermentation. On distingue deux catégories selon le degré d’alcool résiduel :

  • le vin désalcoolisé dont le degré d’alcool est inférieur à 0,5% vol. ;
  • le vin partiellement désalcoolisé dont la teneur en alcool est comprise entre 0,5% et 8,5% ou 9% vol. (selon la zone viticole). 

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Le procédé s’applique après fermentation : on préserve d’abord l’intégralité des composés aromatiques (tanins, acidité, phénols) pour ne retirer que l’éthanol. Qu’il s’agisse d’osmose inverse, d’évaporation sous vide ou de distillation, l’objectif est toujours de sauvegarder au mieux le profil organoleptique initial du vin.

Différences organoleptiques avec le vin traditionnel

Bien que les vins désalcoolisés conservent certaines caractéristiques des vins traditionnels, notamment les tannins, la fraîcheur et l'acidité, leur texture et leur sensation en bouche diffèrent, car l’alcool joue un rôle majeur dans la rondeur et la structure du vin. Les vins désalcoolisés apportent ainsi une nouvelle expérience gustative aux consommateurs :

  • Structure et rondeur : l’alcool confère du volume et de la rondeur. Un vin désalcoolisé paraîtra souvent plus léger, avec une sensation de corps réduite.
  • Température de service : sans l’effet chauffant de l’alcool, on ressent plus nettement la fraîcheur et l’acidité ; il est donc recommandé de servir ces vins à une température légèrement plus basse (8–10°C pour les blancs, 12–14°C pour les rouges).
  • Arômes : la majorité des arômes primaires (fruités, floraux) et secondaires (notes de fermentation) sont conservés, mais les arômes tertiaires (boisé, grillé) peuvent sembler moins intenses sans alcool pour les développer.
  • Équilibre sucres/acides : l’absence d’alcool modifie le ressenti de la douceur naturelle et de l’acidité ; les vins désalcoolisés bénéficient souvent d’un léger ajustement en sucrosité pour compenser.
  • Persistance aromatique : la tenue en bouche est généralement plus courte, car l’alcool prolonge naturellement la persistance des saveurs.

En somme, si la structure et la chaleur apportées par l’alcool font défaut, le vin désalcoolisé offre une expérience gustative centrée sur la pureté aromatique et la fraîcheur, convenant parfaitement à une dégustation légère et moderne.

Techniques de désalcoolisation du vin


Plusieurs méthodes permettent de réduire ou d’éliminer l’alcool dans le vin, avec des différences en termes de coût et d’efficacité. L’objectif principal est, dans tous les cas, de préserver au mieux les arômes et l’équilibre du vin.

Osmose inverse

Cette méthode consiste à filtrer à très haute pression l'alcool du vin. Seules les molécules d'alcool passent à travers une membrane, tandis que le reste du vin est conservé. Ce procédé préserve les composés aromatiques mais il peut modifier légèrement l’équilibre du vin. Le coût est élevé.

Extraction par membranes

Similaire à l’osmose inverse, cette méthode utilise une membrane pour extraire une partie de l’alcool. L’alcool est ensuite retiré du filtrat et le liquide est réintégré dans le vin. Les arômes sont bien conservés mais le procédé peut modifier légèrement la structure du vin. L’extraction est moins efficace pour une désalcoolisation totale.

Evaporation sous vide

Le vin est chauffé à basse température (25-30°C) sous vide pour évaporer l’alcool avec un minimum d’impact sur les arômes. Il s’agit d’une technique douce qui conserve une bonne partie du profil aromatique du vin. Toutefois, elle peut altérer les arômes plus volatils.

Distillation sous vide

Le vin passe dans une colonne à cônes rotatifs qui sépare les arômes, l’alcool et l’eau par évaporation sous vide. L’alcool est éliminé, puis les arômes sont réintégrés dans le vin. Cette technique complexe est coûteuse, donc généralement réservée aux vins haut de gamme.

Plus efficaces, l’évaporation ou la distillation sous vide sont utilisées pour la désalcoolisation totale tandis que l’osmose inverse ou l’extraction par membrane sont adaptées à la désalcoolisation partielle.


Tendances de marché des vins désalcoolisés


Bien que le marché des vins désalcoolisés reste encore marginal, représentant seulement 3 % des volumes, il progresse chaque année. Initialement popularisées en Angleterre sous le terme no-low, pour « no alcohol, low alcohol », les boissons sans ou à teneur réduite en alcool séduisent une clientèle désireuse de consommer sainement tout en se faisant plaisir.

Selon une étude réalisée par le cabinet Seeds pour Moderato (baromètre du vin sans alcool 2025), 13% des Français ne consomment pas d'alcool (+ 2% en un an), et 4 Français sur 10 consomment des boissons sans alcool. De plus, 44% de la population française cherche à réduire ou stopper sa consommation d’alcool.

Si la France a mis plus de temps que d’autres pays à s’y mettre, sans doute à cause d’une culture œnologique forte, elle rattrape son retard. L’export offre également de belles perspectives pour les vignerons. 


Avantages commerciaux et réglementaires pour les vignerons


Les vins désalcoolisés ouvrent la porte à une nouvelle clientèle : les personnes soucieuses de leur santé, des consommateurs avec des restrictions alimentaires ou religieuses, les jeunes générations, et même des amateurs de vin en recherche de nouveautés… C’est donc un nouveau marché à explorer, une opportunité pour les vignerons de diversifier leur gamme de produits et attirer une clientèle plus large, tout en bénéficiant d’un cadre réglementaire assoupli.

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Règlementation européenne et française

Les vins désalcoolisés présentent d’autres atouts stratégiques. Contrairement aux vins classiques, ils ne sont pas soumis aux réglementations strictes en matière de vente, de taxation et de consommation d’alcool. Ils peuvent être vendus là où l’alcool n’avait plus droit d’entrée (cafétérias d’entreprises, événements sportifs, etc.). 

Au niveau européen, tout vin affichant moins de 0,5% vol. d’alcool est considéré comme une boisson « sans alcool » et n’est pas soumis aux accises sur l’alcool
En France, cette même teneur permet d’échapper à la loi Évin : publicité, PLV et sponsoring peuvent utiliser un ton plus libre, sans passer par les interdits habituels. De plus, l’absence d’exigence d’âge légal pour la vente facilite la distribution dans des lieux où l’alcool est proscrit (entreprises, établissements médico‑sociaux, événements familiaux).
Résultat : une logistique plus simple et des coûts de taxation fortement réduits.

Compatibilité avec AOP, IGP et bio

Pour les vins bénéficiant d'une Indication géographique protégée (IGP) ou Appellation d'origine protégée (AOP), seule la désalcoolisation partielle (jusqu’à 8,5–9% vol.) est autorisée, sous réserve que cette pratique soit prévue dans leur cahier des charges. 

À ce jour, seules quelques AOP l’ont fait figurer, mais l’intérêt grandissant pousse d’autres appellations à l’envisager. Du côté du vin biologique, les règles européennes autorisent désormais (depuis 2025) les procédés doux d’évaporation sous vide partielle et de distillation pour obtenir un titre alcoométrique inférieur à 0,5% vol. : un allègement réglementaire qui encourage les vignerons bio à développer leur offre « sans alcool » tout en restant fidèles à leur certification.

Cépages recommandés pour la désalcoolisation


On pourrait penser que ce sont les vins les plus légers qui se prêtent mieux à la désalcoolisation, mais c’est plus compliqué que cela. Les vins les plus adaptés sont ceux qui conservent de bonnes caractéristiques organoleptiques après la suppression de l'alcool. En vin blanc, les bons candidats sont les cépages aromatiques, tels que le Sauvignon ou le Riesling. En vin rouge, les cépages riches en arômes de fruits rouges et ayant peu de tanins sont plus adaptés, comme le Merlot. Les rosés légers et fruités, peu tanniques, conservent bien leur équilibre.
Plus un vin est expressif avant désalcoolisation, mieux il résiste au processus. 


Conclusion : opportunités et conseils pratiques


Le vin désalcoolisé séduit un nombre croissant de consommateurs en France et ailleurs, et les producteurs commencent à investir ce marché. La gamme « sans alcool » ou peu alcoolisée a toute sa place dans l’offre des vignerons. Mais, si ce marché affiche un dynamisme prometteur, il convient d'évaluer sa faisabilité technique et économique avant de se lancer.

L'absence ou la réduction d'alcool ne signifie en aucun cas une diminution du savoir-faire. Au contraire ! De la vigne au chai, jusqu’au procédé de désalcoolisation, chaque étape exige rigueur et expertise de la part du vigneron pour garantir des vins désalcoolisés de qualité.

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