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Eleveur

Vermifugation des bovins : quelle stratégie choisir ?

Écrit par  Delphine Huet
Publié le 25 mars 2025
8 min. de lecture

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vache (9)
L'un des enjeux majeurs d'un éleveur, c'est de gérer la bonne santé de son troupeau. La question du parasitisme n'épargne aucune espèce. Attardons nous aujourd'hui sur les bovins.

Vous êtes peut-être en pleine réflexion sur vos méthodes de vermifugation ? Quelle molécule utiliser ? Quel vermifuge bovin est le plus adapté à votre élevage ? Faisons un tour de pâture pour y voir plus clair.
 

L’importance de la vermifugation des bovins dans la réussite économique de l’élevage

 
Avoir un troupeau en bonne santé est essentiel pour une productivité optimale. Comme le dit l’expression populaire : “cela va sans dire, mais cela va mieux en le disant”.
 
Et les chiffres sont là pour vous convaincre, si besoin était. Savez-vous qu’un reproducteur parasité est beaucoup moins fertile ? Que les laitières risquent de donner un à trois litres de lait en moins par jour ? Aussi, cela joue sur leur capacité à bien digérer et donc utiliser la ration que vous avez passé tant de temps à produire et préparer. C’est embêtant pour les bovins allaitants comme les laitiers.
 
Non, impossible de passer à côté d’une bonne gestion sanitaire, et particulièrement, parasitaire. Les bovins sont confrontés aux parasites internes, digestifs ou respiratoires, principalement des strongles, mais aussi à la douve du foie (surtout la grande).
 
Mais il y a l'art et la manière d'utiliser un vermifuge bovin. S’intéresser au déparasitage de vos animaux est un enjeu majeur, mais il faut surtout savoir bien le faire. C’est un peu comme les antibiotiques : “c’est pas automatique !” Regardons cela de plus près.  
 

Différentes stratégies de vermifugation

Choix du vermifuge selon l'âge des bovins

Il existe des principes actifs répartis en 3 classes :
Les benzimidazoles, souvent par voie orale ;
Les lactones macrocycliques, avec plusieurs voies d’administrations possibles ;
Les imidazothiazoles, moins utilisées.
 
S’il n’est pas le seul critère, l’âge des animaux est néanmoins un facteur décisif dans le choix de la molécule à utiliser.
 
tableau (2)

Animaux d'un an

Préférez pour eux des vermifuges à large spectre. Ils ont besoin d’acquérir une immunité, et en attendant, d’être davantage protégés que leurs aînés. Il leur faut donc une armure solide contre les nématodes gastro-intestinaux et les parasites pulmonaires.
 
Bien sûr, vous adapterez les dosages selon les poids des vaches, mais aussi la charge parasitaire de votre cheptel, et l'historique de votre ferme. Inutile de charger la mule si vous avez un environnement plutôt sain.
 

Animaux de 2 ans

Comme des ados, ils s’arment peu à peu contre les menaces parasitaires. Grâce à une exposition progressive et une protection adaptée dès le premier âge, ils peuvent désormais être traités un peu moins intensivement. Il n’est pas question pour autant de relâcher l’attention.
 
Soyez vigilants surtout si vous êtes dans un territoire à forte pression parasitaire, ou que vous les emmenez sur des parcelles particulièrement sensibles. Oui, c’est bien ça, le fameux parc en bord de rivière qui est toujours très humide !
 

Animaux de plus de 3 ans

Vous avez compris le principe. Plus ils grandissent, plus vous pouvez espacer les administrations de vermifuges. La règle devient davantage “à la carte”, ou “sélective”, basée sur des analyses coprologiques. Si vous avez des lots susceptibles d’être plus exposés ou sur lesquels vous avez remarqué des symptômes, ne tardez pas à agir. Le poil piqué ou la baisse d’appétit doivent vous alerter.
 

Choix du type de traitement selon l’impact recherché

Traitements non rémanents

Ils agissent rapidement pour éliminer les parasites présents au moment du traitement. Mais comme ils ne savent pas tout faire, ils ne protègent pas les animaux sur le long terme. C’est plutôt en cas d’infestation sur un lot ou un animal bien identifié, qu’il faut déparasiter rapidement. Action, réaction !
 

Traitements rémanents

Les molécules sont capables de faire effet quelques semaines. Cela peut être utile pour des lots plus sensibles, plus exposés aux parasites, pour les aider à lutter plus durablement contre eux.
 

Traitements à libération séquentielle ou continue

Si vous n’avez pas de chance et que votre environnement est particulièrement menaçant pour vos bêtes (on parle toujours des parasites), ce type de vermifuge bovin peut être d’un grand secours. Les principes actifs agissent sur une longue période car ils sont diffusés progressivement.
 
Cependant, rappelons que l’usage de molécules médicamenteuses n’est jamais anodin, que ce soit sur le plan économique, environnemental ou sanitaire. L’idéal est encore de prévenir, plutôt que guérir. Si votre troupeau est fréquemment exposé à une grande charge parasitaire, ou qu’ils semblent avoir du mal à lutter contre, il vaut mieux s’interroger sur les moyens préventifs que vous pourriez adopter.
 

Choix du mode d'administration : pour-on ou injectable

Le pour-on

Les vétérinaires conseillent ce mode d’administration sur le dos de l’animal lorsqu’il y a besoin d’agir vite sur un lot. Mais il y a quelques réserves : “C'est rapide, c'est pratique, mais ce n'est pas précis”.
 tableau (502 x 338 px) (1)
Notez que si les bovins ont un poil très exposé à la boue, la pénétration du produit sera plus aléatoire. Et sachant que 20 à 30% à peine du produit pénètrent réellement, il est compliqué à doser. C’est donc synonyme d’un coût élevé, et au final c’est votre compte en banque qui va s’affoler.
 

L'injectable

La Société Nationale des Groupements Techniques Vétérinaires (SNGTV) est d’avis que ces solutions sont préférables, lorsque c’est possible. En effet, pour un même résultat en termes d’efficacité, vous aurez besoin de bien moins de substance active qu’avec les vermifuges en pour-on.
 
Plus écologiques, plus économiques, on ne veut pas vous influencer, mais ayez cela en tête lorsque vous utilisez vos vermifuges. Les exploitations dites “responsables”, engagées dans une démarche de qualité, ne peuvent ignorer cette donnée.
 

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De la bonne utilisation d'un vermifuge bovin

Planification et calendrier (ou non) de vermifugation

Vient l’épineuse question du “quand ?”. Les périodes choisies correspondent à la fois aux étapes du cycle de vie de votre troupeau sur une saison, et à celles du cycle de vie des parasites.
Généralement, on identifie deux moments clés dans la vie de l’élevage : 
 

Avant la sortie au pré

On préfère les traitements rémanents, pour aborder au mieux la mise à l’herbe et optimiser la période de pleine production à venir, en lait comme en viande. 
 

Avant la rentrée à l'étable

Cela concerne surtout les jeunes bovins, qui vont passer leur premier hiver en zone plus confinée. Si vous avez un passif de charge parasitaire importante dans vos bâtiments, soyez vigilants.
 
Entre les deux, il faudra agir en fonction des besoins identifiés. Le meilleur outil d’évaluation est votre œil d’éleveur, surveillant chaque jour vos animaux et leur état. Vous pouvez également faire pratiquer des coprologies en cas de doute, en complément d’une évaluation de l'état corporel. C’est le meilleur moyen d’être fixé sur un niveau d’infestation, et l’identité de l’indésirable.
 
Dans tous les cas, hors de question de reproduire des procédures qui ne conviendraient pas à votre élevage. Prenez rendez-vous avec votre vétérinaire pour établir un plan de lutte personnalisé. C’est en effet une règle élémentaire de bon sens. Les bovins ne doivent être vermifugés que lorsqu’ils en ont besoin, et donc pas seulement en fonction de la période de l’année et de leur vie dans laquelle ils se trouvent.
 
Ce serait trop simple si la règle était la même pour tous, mais c’est ce qui rend le travail intéressant, non ?
 
Prévoyez néanmoins de vermifuger les animaux quelques jours avant une vaccination, plutôt qu’en même temps. Tant pis pour la double manipulation, mais c’est préférable pour ne pas risquer de limiter le développement des anticorps.
 

Les bonnes pratiques pour gérer le parasitisme

On peut citer quelques règles élémentaires qui vont faciliter votre gestion du parasitisme, et donc potentiellement limiter l’utilisation des vermifuges.
 
1. Peser les animaux pour éviter le sous-dosage, qui contribue à l'apparition de résistances. En gros, les molécules sont en quantité trop faible pour exterminer l’envahisseur, et suffisante pour permettre aux survivantes de développer des mécanismes de défense ;
 
2. Cibler les animaux à hauts risques, comme les veaux et les jeunes bovins de moins de 16 mois. Ils ont besoin d'acquérir une immunité, avec une exposition faible durant 8 mois environ ;
 
3. Pratiquer un traitement simultané avec au moins deux produits de classes différentes. Cette méthode a fait ses preuves pour contrôler le développement de la résistance, plutôt que faire une rotation entre les classes de médicaments ;
 
4. Faire attention à sa mise au pâturage et éviter le surpâturage et le chargement à l’hectare, sinon c’est la voie royale pour l’infestation ! On l’estime à un niveau quatre fois plus élevé, pour seulement deux fois plus d’animaux sur un même espace, selon la Fédération Régionale des Groupements de Défense Sanitaire (FRGDS).
tableau (4) (1) 
Une dernière astuce pour la route ? Le pâturage tournant croisé avec d'autres espèces a montré son efficacité sur le parasitisme. Il permet essentiellement de couper des cycles de production des parasites, quand ils sont spécifiques à une espèce. En faisant suivre des chevaux ou moutons après des bovins, par exemple.
 tableau (3) (1)

Zoom sur la fiche TRI, avec CEVA Santé Animale

La "Fiche TRI", un examen complémentaire pour une meilleur prise en charge de l'impact des strongles gastro-intestinaux chez les vaches laitières à la rentrée à l'étable.
 
La maîtrise du parasitisme de pâturage est essentielle pour préserver les performances zootechniques et la santé des ruminants. La prévention des strongles gastro-intestinaux repose sur plusieurs leviers, tels que la gestion du pâturage, le renforcement de l'immunité des jeunes et l'utilisation des vermifuges. Cependant, l'utilisation des vermifuges doit être réévaluée compte tenu des nouvelles problématiques et connaissances, notamment :
 
Le développement de la résistance des vers aux principes actifs des vermifuges
L'impact environnemental des principes actifs encore présents dans les bouses (bousiers)
La nécessité de rentabiliser chaque dépense pour vous éleveur
 
Ainsi, une stratégie de vermifugation sélective et adaptée à chaque troupeau doit être mise en place pour répondre à ces enjeux, en particulier pour les vaches laitières à la rentrée à l'étable, période clé pour la vermifugation de ces animaux.
 
D’après des études faites récemment, quel que soit le troupeau en pâturage, les vaches ayant la meilleure réponse en termes de production laitière après le traitement à la rentrée à l'étable sont les animaux en lactation avec moins de 200 jours de lactation, présentant un pic de production dans le tiers inférieur des pics observés, calculé par classe de rang de lactation dans chaque troupeau.
 
Cette stratégie est encore plus pertinente dans les troupeaux ayant une part de pâturage modérée à élevée (>20 ares pâturés/vache laitière) et un faible contact des génisses avec le parasite (moins de 8 mois de pâturage avant le premier vêlage, en tenant compte de la durée de rémanence des traitements et des périodes de sécheresse).
 
Nous vous proposons d’éditer pour votre troupeau, la liste des animaux prioritaires à une vermifugation à la rentrée à l’étable.
 
Vous pourrez ainsi discuter avec votre vétérinaire de la meilleure stratégie à adopter à partir de cette liste « Fiche TRI ».

Préparez votre fiche TRI avec Troup'O

Votre application Troup'O rassemble toutes les données de votre élevage : vous pouvez envoyer vos données en direct à CEVA pour créer votre fiche TRI en un clic !

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Conclusion


Vaste sujet que celui de la vermifugation des bovins. Entre grands principes et adaptations à votre situation personnelle, il faut savoir trouver le juste milieu. Retenez que l’âge des animaux, la période de l’année, ou encore l’objectif attendu en matière d’efficacité, sont des indicateurs qui peuvent orienter votre choix.
 
Mais le meilleur vermifuge est celui que l’on n’utilise pas. Autrement dit, préférez optimiser l’immunité de vos bêtes, et leur offrir des conditions de vie qui limitent la charge parasitaire. Il y a même des espèces prairiales connues pour être des vermifuges naturels, comme le plantain. Vous le saviez ?