La flavescence dorée peut entraîner des pertes de récoltes importantes, voire l’arrachage complet de la parcelle. Il n’existe actuellement aucun traitement curatif contre cette maladie de la vigne. Les actions se portent donc contre son vecteur principal : la cicadelle Scaphoïdeus titanus. Biologie, prévention, traitements disponibles : découvrez tout ce qu’il faut savoir sur la flavescence dorée.
SOMMAIRE
Qu'est-ce que la flavesence dorée ?
Impacts de la flavescence dorée sur le vignoble
Les vecteurs de la flavescence dorée
Les symptômes de la flavescence dorée dans le vignoble
La flavescence dorée est une jaunisse de la vigne particulièrement contagieuse et dangereuse pour les vignobles. Son agent pathogène est un phytoplasme nommé Candidatus phytoplasma vitis.
Découverte dans les années 1960, cette bactérie sans paroi est endémique des aulnes européens. Elle se développe dans le phloème secondaire des vignes, le tissu responsable du transport des sucres et des nutriments dans la plante . Son développement est non homogène dans le cep : les symptômes peuvent donc au départ être localisés dans un seul rameau.
La flavescence dorée est une maladie dite de quarantaine. Pour la contrôler, il est nécessaire de déclarer sa présence afin de traiter rapidement les parcelles concernées . Une fois le pathogène installé dans la plante, il le reste à vie.
Cette maladie fut observée pour la première fois en Gascogne en 1955 . Elle s’est ensuite propagée dans le reste de la France puis vers d’autres pays européens. On la trouve aujourd’hui en :
• Allemagne
• Autriche
• Croatie
• Espagne
• France
• Hongrie
• Italie
• Portugal
• Suisse
• Slovénie
• Serbie
En France, seules la Champagne et l’Alsace sont épargnées . En revanche, toutes les filières sont concernées : vigne de production, pieds-mères et pépinières.
La flavescence dorée engendre divers dégâts tels que :
• la mortalité des inflorescences
• le flétrissement des raisins
• la baisse des rendements
• la mort du cep
Du fait de la propagation rapide des vecteurs en l’absence de propsections, le nombre de souches de vigne infectées peut être multiplié par 10 chaque année : en 3 ou 4 ans, la parcelle peut être condamnée . Il suffit d’un seul pied malade pour contaminer l’exploitation et les parcelles voisines.
Cette maladie est considérée comme un fléau majeur pour la viticulture. Elle met en danger la survie même des exploitations. Si plus de 20 % des ceps d’une parcelle sont touchés, alors l’arrachage du carré est impératif.
Or, la propagation de la flavescence dorée s’explique par 3 facteurs liés :
• la rapidité de propagation des vecteurs
• le manque de détection et de déclaration
• le nombre de souches touchées non arrachées, foyers infectieux insoupçonnés
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Il existe à ce jour 2 vecteurs identifiés : la circadelle Scaphoïdeus titanus et le greffage.
Cette cicadelle est le seul vecteur naturel connu de Candidatus phytoplasma vitis. Elle fut importée d’Amérique du Nord avec des ceps de Vitis résistants au phylloxera, probablement à la fin du 19e siècle.
Tout le cycle de vie de l’insecte se passe sur la vigne. Larves et adultes se nourrissent en suçant la sève, notamment au niveau des nervures de la face inférieure des feuilles. Si le cep est infecté, la cicadelle absorbe le phytoplasme, qui se développe dans son organisme. Elle devient infectieuse au bout d’1 mois puis inocule la bactérie aux ceps sains lorsqu’elle s’y nourrit.
Ce ravageur prend la forme d’un insecte de forme allongée (entre 6 et 7,5 mm) et de couleur brun-jaune. Il survit à l'hiver sous forme d'œufs nichés dans l'écorce des vignes. Au printemps, les larves éclosent et traversent plusieurs stades de développement, d’environ 10 jours chacun. Notez qu’il n’existe pas de transmission directe du phytoplasme aux générations successives : les œufs sont toujours sains.
On reconnaît les stades à la couleur et à la taille des larves :
• stade 1 : blanc translucide, 1 à 1,5 mm
• stade 2 : blanc laiteux, 2 à 2,5 mm
• stade 3 : jaune clair, 3 à 3,5 mm
• stade 4 : jaune clair avec pigments blancs, 4 à 4,5 mm
• stade 5 : jaune avec pigments bruns, 4,5 à 5 mm
• stade adulte : ocre avec nervures brunes au-dessus de la tête, 4,8 à 5,8 mm
Cette larve est aussi reconnaissable aux 2 points noirs situés à l’extrémité de son abdomen.
Les premiers individus ailés apparaissent vers la mi-juillet : ceux-ci peuvent coloniser les parcelles alentour. La progression de la maladie peut donc être très rapide : sans contrôle, la population peut atteindre 10 000 individus à l’hectare . On peut observer à cette période plusieurs stades de la cicadelle simultanément. Les observations montrent une recrudescence de la ponte en août et en septembre ainsi qu’une activité maximale entre la fin de l’après-midi et le début de matinée.
Le greffage est le second vecteur possible de la maladie. Les pépinières et les parcelles de vignes-mères étant également la cible des cicadelles, Candidatus phytoplasma vitis peut être directement transmis aux plants. Il est à noter que les pieds-mères infectés par la flavescence dorée n’expriment pas de symptômes, ce qui rend les contrôles des porte-greffes complexes et favorise la propagation de la maladie.
Il s’avère assez difficile d’identifier les symptômes de la flavescence dorée à l’œil nu. Ils peuvent être confondus avec ceux de :
• l’esca
• l’excoriose
• la maladie du bois noir
• la chlorose ferrique
• les carences en magnésium
• les accidents physiologiques ou traumatiques
• l’action des cicadelles des grillures ou vertes
Seuls des tests en laboratoire (PCR et ELISA) peuvent confirmer sa présence.
L’autre difficulté provient de l’absence de symptômes visibles au moment de la contamination. La maladie ne se signale généralement que 1 an après l’infection. Mais même sans signe, le cépage reste un réservoir de phytoplasme.
Certains pieds peuvent même se rétablir jusqu’à la réapparition des symptômes au bout de plusieurs années. D’où l’importance de la lutte préventive en amont contre le vecteur. Une fois déclarés, les signes sont visibles jusqu’aux gelées.
L’un des premiers symptômes observables est le changement de couleur du feuillage, similaire à une carence nutritionnelle :
• jaunissement sur les cépages blancs
• rougissement sur les cépages rouges
D’autres signes permettent toutefois de distinguer la jaunisse de la carence :
• retard de débourrement au printemps
• rétrécissement des feuilles
• bords du limbe qui se recourbent
• nervures qui deviennent rouges ou violettes
• feuille qui s’enroule en tuile et durcit
Source photo : IFV Occitanie
Du côté des rameaux, on remarque un mauvais aoûtement. Certains brins restent verts et caoutchouteux au lieu de se lignifier et de durcir. Ils peuvent ne pas résister à l’hiver. Dans les cas avancés, la jaunisse conduit au dépérissement, voire à la mort du pied.
Source photo : GDON Bordeaux
Au niveau des fruits, la maladie peut provoquer l’avortement ou le dessèchement des inflorescences. On peut aussi observer la déformation des grappes, l’absence de baies ou un retard dans la maturation des raisins.
Source photo : GDON Bordeaux
Il n’existe à ce jour aucun cépage ou porte-greffe résistant à la bactérie. Mais si toutes les variétés sont sensibles, l’intensité de l’expression des symptômes peut varier :
• Très sensibles : cabernet franc, cabernet sauvignon, chardonnay, marselan, sauvignon blanc
• Sensibles : carignan, chenin, colombard, cot gamay, grenache, mourvèdre
• Peu sensibles : folle blanche, merlot, muscat, pinot noir, syrah.
La flavescence dorée est actuellement en recrudescence dans de nombreux vignobles. Comme il n'existe pas encore de traitement curatif contre l’agent Candidatus phytoplasma vitis, la prévention et la gestion de cette jaunisse exige d’importants moyens de lutte :
• messages réglementaires
• suivi du bulletin de santé du végétal
• surveillance des populations d’insectes
• mise en quarantaine des régions affectées
• traitements obligatoires spécifiques
• élimination des souches infectées
• plantation de vignes saines
Ces moyens génèrent des surcoûts et de nouvelles contraintes techniques parfois difficilement compatibles dans le cadre de l’agriculture raisonnée, biologique ou biodynamique.
Toutefois, la lutte contre cette jaunisse est indispensable pour ne pas voir le vignoble français disparaître. Viticulteurs et pépiniéristes doivent doubler de vigilance pour contrôler leur matériel végétal et le développement des vecteurs, tout en travaillant de manière collective.
Le Règlement 2019/2072/UE et l'arrêté ministériel français du 27 avril 2021 dictent des mesures de contrôle rigoureuses contre cette maladie classée organisme de quarantaine. La déclaration immédiate de tout cas suspect à la DRAAF est requise.
Des interventions spécifiques sont mandatées là où la maladie est présente ainsi que dans les zones délimitées définies par arrêté préfectoral. Les actions antivectorielles sont obligatoires partout où Scaphoïdeus titanus n’est pas officiellement absente.
Des prestataires locaux effectuent aussi des suivis biologiques en région afin de réaliser des analyses de risques dans les communes qui aident la DRAAF dans sa prise de décision.
La prévention commence dès la production chez les pépiniéristes. Elle consiste à réaliser un traitement des plants à l’eau chaude (TEC). Leur immersion pendant 45 minutes, dans une eau à 50°C, doit éliminer le phytoplasme, sensible à la chaleur. Le traitement aurait également un effet sur les œufs de la cicadelle. Il existe encore des incertitudes quant aux conséquences sur la vitalité du matériel végétal : problème de reprise, retard de débourrement…
La seconde stratégie repose sur l’observation visuelle des symptômes dans les vignobles :
• période de prospection : de juillet à septembre
• passage un rang sur 2 pour chercher les larves et les adultes
• marquage des souches contaminées
• déclaration des symptômes au plus tard le 20 septembre
La troisième stratégie concerne les actions à entreprendre pour garder un vignoble sain :
• brûler les bois de taille
• épamprer les souches
• supprimer les repousses sauvages, dans et autour des carrés
• éliminer les ceps contaminés avant le 31 mars en N+1
• arracher la parcelle entière si plus de 20 % de pieds atteints
Des études se concentrent également sur l’environnement direct de la vigne. Des risques de contamination pourraient effectivement venir des plantes sauvages aux alentours.
La lutte chimique est obligatoire dans tout périmètre déterminé par arrêté préfectoral. Dates et nombre d’interventions sont définis en fonction des analyses sur le terrain et des risques de contamination.
Cette lutte chimique prend la forme de 2 à 3 traitements insecticides, à débuter 1 mois après les premières éclosions. En 2021, la DRAAF recensait plus de 70 produits autorisés en France et 10 substances actives visant à éliminer le vecteur.
En parallèle du traitement, il est essentiel de procéder à un comptage dans les parcelles, avant et après le passage, en respectant le délai de réentrée(.
Bon à savoir : la protection par confusion sexuelle comme dans le cas d’Eudémys est totalement inefficace contre Scaphoïdeus titanus. Cette cicadelle n’a pas recours aux phéromones pour s’accoupler. La lutte insecticide n’a également aucun impact positif sur les souches contaminées.
La situation demeure problématique pour la gestion de la flavescence dorée en conduite biologique, l’usage des insecticides étant prohibé. Pyrévert® est la seule spécialité phytopharmaceutique actuellement homologuée, bien qu’elle présente parfois des baisses d’efficacité.
Du côté du biocontrôle, des tests menés par l’INRA et l’IFV entre 2005 et 2007 n’avaient pas été concluants concernant l’usage d’auxiliaires, de prédateurs et de parasitoïdes.
Les recherches se poursuivent actuellement à différents niveaux pour mieux comprendre et mieux lutter contre cette maladie extrêmement problématique. Voici quelques pistes empruntées par les chercheurs :
• solutions naturelles contre les larves de cicadelles (kaolin / kaolinite calcinée…)
• perturbation des accouplements de Scaphoïdeus titanus par stratégie push-pull
• amélioration des pièges (usage de la couleur orange, positionnement…)
• création de variétés résistantes par croisement
• interruption du cycle ou de la transmission de la bactérie (inhibiteurs, symbiotes…)
• études des interactions avec le climat (vent qui favorise la dispersion des insectes…)
• études du rôle des activités humaines dans la propagation
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